L'immobilier est à la fois cadre et support des expériences du travail
L'entreprise doit s’adapter au monde de demain. Ses besoins, ses forces et ses contraintes fluctuent au gré des soubresauts des marchés, de l’actualité politique, des innovations qui disruptent des systèmes jugés inébranlables. La solidité, valeur suprême de l’entreprise durant tout le 20ème siècle, est aujourd’hui dépassée par l’agilité, cette capacité à être léger et facilement manoeuvrable. “Be Lean” est le motto du chef d’entreprise… À l’instar de Mohammed Ali, l’entreprise doit pouvoir voler comme le papillon, et piquer comme l’abeille… avec la force du poids lourd ! Agile et de plus en plus attentive à ses forces vives ; actant que le bien-être au travail est un levier de productivité extraordinaire, les entreprises du 21ème siècle investissent dans le bonheur de leurs salariés, s’affirment comme les lieux d’un “vivre ensemble” harmonieux.
Le collaboratif y fait des émules, l’intelligence y est collective, l’individualisme dévalué. Certes, toutes ne sont pas encore à ce stade de maturité, mais une tendance de fond se dessine, appuyée notamment par l’innovation et des secteurs comme l’immobilier, dans lequel la créativité se révèle payante.
L’immobilier en l’occurrence ne saurait tourner le dos aux changements ; puisqu’il est à la fois cadre et support des expériences du travail, il est impliqué dans la réflexion autour du modèle d’entreprise souhaité. Le secteur doit s’emparer de bon nombre de sujets pour accompagner sur toute la chaîne de valeur des entreprises pour lesquelles l’immobilier est devenu un enjeu de résilience et donc de performance.
Les générations et le travailleur holistique
Le “projet d’entreprise” ne peut ignorer les données sociétales. Parmi elles, le générationnel fait couler beaucoup d’encre. Nées dans la crise, les générations Y, Z (ou Millenials) ont une approche différente du travail ; elles sont connectées et engagées, ou au contraire peu fidèles. La conception de l’entreprise comme un moule dans lequel il faudrait se fondre ne semble trouver aucun partisan parmi elles ! Les talents se cultivent et se retiennent ; l’attractivité de l’entreprise et son mode de vie devient une pierre angulaire de sa stratégie de recrutement. Plus largement, apparaît une figure du travailleur “holistique”, dont les motivations dépassent l’argent et la consécration professionnelle. L’épanouissement individuel, la famille, l’engagement sociétal, autrefois laissés à la porte de l’entreprise, sont désormais perçus comme une valeur ajoutée.
Les talents se cultivent et se retiennent; L'attractivité de l'entreprise et son mode de vie deviennent une pierre angulaire de sa stratégie de recrutement.
Well Well Well … ou le Bien-Être des salariés
La tendance du “bien-être au travail” repose sur deux piliers : d’une part la prise en compte des rythmes des salariés et de leurs attentes en termes de management, et d’autre part leur vie dans (et hors de) l’espace de l’entreprise. C’est dans ce dernier que la politique immobilière, du choix de localisation dans la ville aux aménagements intérieurs en passant par la conception architecturale, peut exprimer son potentiel. En se mettant “au service de…”, l’environnement immobilier relève des défis considérables : fournir un cadre de travail agréable, favoriser l’engagement des salariés, déclenche l’admiration des partenaires et des clients, installer une image socialement innovante de l’entreprise. Le palmarès Great Place to Work offre une plateforme de communication efficace pour l’entreprise lauréate. Elle peut y valoriser les efforts qu’elle fait pour atteindre l’efficience maximale grâce à un management par le bonheur, ainsi qu’une politique immobilière alignée avec ses ambitions. A quand un indice de performance immobilière indexé sur le bonheur au travail ?
Les nouvelles dynamiques du travail
L’espace-temps classique du travail tend à disparaître : le traditionnel bureau individuel ou l’open space sont bousculés par une approche plus holistique du travail. L’idée d’un collectif d’individus partageant des équipements communs fait son chemin dans les entreprises, devenues adeptes du “bureau partagé”. Des lieux collectifs de repos ou de loisirs font leur apparition, avec l’idée sous-jacente que “quand on ne travaille pas, on travaille quand même”, le concept de serendipité ayant largement séduit. Le temps du travail est moins linéaire ; les interruptions sont plus fréquentes, certaines règles s’assouplissent, on mixe vie privée et vie dans l’entreprise. Et le télétravail, encore minoritaire, fait une poussée inexorable. L’environnement de travail s’affirme donc comme le lieu d’une vie collective, créateur de liens ou plateforme de services. Et de fait, le travail moins “mécaniquement contraint” et vécu comme tel, permet de développer l’intelligence collective et l’intrapreneuriat. Le salarié libère sa parole, est force de proposition. Le “leader” destitue le “chef” et les égos sont tus.
Agilité, entre mythe et réalité
Terme issu des processus de conception informatique (méthode agile), utilisé à tort et à travers, la séduisante “agilité” reste malheureusement, dans la plupart des entreprises, un fantasme managérial, qui se traduit, au mieux, par une invocation, au pire par une injonction dangereuse lorsque les organisations sont fondamentalement inadaptées à ces méthodes. “Être agile” ne se commande pas, c’est le résultat d’une profonde remise en question des structures hiérarchiques qui sont encore en vigueur dans les grandes et moyennes entreprises.
Le management agile néanmoins reste d’une grande valeur et deviendra probablement un modèle d’organisation répandu. Sa traduction immobilière est protéiforme, puisque justement, dans la méthode agile, un modèle doit être testé et modifié par itérations, jusqu’à être parfaitement adapté à ses utilisateurs. La capacité des immeubles à être flexibles et évolutifs (certains diront “ready to any services”) doit permettre à l’organisation adaptabilité et résilience.
Du Smart au Responsive building
Désormais le bâtiment doit “s’équiper en intelligence” : à la fois pour permettre la réalisation des objectifs et pour rendre mesurables les progrès accomplis. C’est la vague “green”, impulsée par de fortes volontés politiques européennes (comme la réduction des factures énergétiques et des émissions de CO2) qui a fait entrer les technologies dans le bâtiment. Des certifications comme BREEAM ou LEED, avec leurs lourds cahiers des charges technologiques, ont inauguré l’ère de la sobriété et de la cohérence énergétique. Leur application s’est traduite par des améliorations significatives des consommations et du confort des utilisateurs. D’ici au développement des services généraux liés aux new techs, il n’y avait qu’un pas, franchi par une myriade de nouveaux acteurs, start-up et acteurs historiques confondus, qui oeuvrent à l’amélioration continue des usages du bâtiment, tertiaire ou résidentiel.
Connecté à la ville, support d’expérience de l’IoT (Internet of Things), l’immeuble devient crucial par les données qu’il engrange et produit. Même si l’open data semble être au centre d’un consensus, le futur exigera de statuer sur la propriété et l’utilisation de ces données. Des partenariats se tissent déjà entre acteurs, et l’accès aux données en est une composante majeure. La data nous réserve bien des surprises... on parle de cognitive buildings, de responsive buildings, dotés d’une intelligence artificielle auto-apprenante.
Offrir des opportunités épanouissantes
Devant ce changement de paradigme, les métiers de la chaîne de valeurs immobilière revoient leurs positions. Au plus près des problématiques des entreprises, ils doivent faire évoluer leur offre. Pour conserver son marché, il faut innover, être force de proposition, créatif, et débloquer les points de tension de ses clients. Ceux-ci sont nombreux, et le seront encore plus à l’avenir, avec la complexification technologique et les nouveaux besoins : gestion des risques d’espionnage, des risques naturels, logistique, sécurité des biens, des personnes et des données, maintenance, communication, gestion des infrastructures informatiques, services personnalisés… Les sujets sont vastes et les opportunités multiples. La réactivité et l’adaptation sont clés : pour preuve les start-up qui en quelques mois peuvent quintupler leurs effectifs, l’espace qu’elles occupent, et les services qu’elles consomment.
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